TÉLÉOSTÉENS ET HOLOSTÉENS

TÉLÉOSTÉENS ET HOLOSTÉENS
TÉLÉOSTÉENS ET HOLOSTÉENS

Le groupe des Téléostéens, par sa diversité morphologique, biologique, écologique, représente un remarquable succès évolutif. Avec environ vingt-cinq mille espèces, non seulement il est le groupe de Poissons de beaucoup le plus nombreux, mais, en outre, il compte à peu près autant d’espèces que tous les autres Vertébrés réunis. On trouve des Téléostéens dans tous les milieux aquatiques, marins ou dulçaquicoles, dans les zones abyssales comme dans les torrents de montagnes, sous les tropiques comme dans les régions polaires. Plusieurs espèces, sans être véritablement terrestres, sont capables de quitter, pour un temps, le milieu aquatique et de se déplacer sur la terre ferme.

La grande diversité du groupe rend difficile une définition qui englobe toutes les formes connues. Il faut situer les Téléostéens parmi les autres Actinoptérygiens, et en particulier par rapport aux formes fossiles et actuelles autrefois classées dans le groupe des Holostéens, ensemble artificiel qui n’a aucune valeur phylétique [cf. ACTINOPTÉRYGIENS]. Les premiers Téléostéens sont connus dans le Trias moyen.

Parmi les caractères morphologiques importants, on retiendra seulement:

– la réduction des écailles ganoïdes qui perdent le revêtement d’émail (ganoïne) et se réduisent à une mince lame d’os généralement acellulaire (écailles élasmoïdes);

– un enfoncement des os dermiques du crâne, l’apparition d’un grand os impair, le supraoccipital qui sépare les pariétaux, la modification de la région occipitale, du fait de son invasion par une musculature d’origine troncale (fig. 1).

– un squelette caudal compact comportant des arcs hémaux modifiés et élargis, les hypuraux , et des éléments dermiques (écailles modifiées) dorsaux, les urodermaux (fig. 2). Beaucoup de spécialistes considèrent la structure de la nageoire caudale comme le meilleur caractère diagnostique des Téléostéens. Le caractère monophylétique de ces derniers a ainsi pu être reconnu.

1. Forme et taille

La forme générale des Téléostéens est extraordinairement variée, comme on le verra plus loin à propos de la classification. Si la morphologie typiquement pisciforme est très répandue (Hareng, Truite, Thon, Cyprin), elle peut se modifier énormément par allongement, raccourcissement, aplatissement latéral ou dorso-ventral, élévation du corps... Les modifications des diverses nageoires par extension, réduction ou disparition peuvent changer la silhouette du poisson (cf. chap. 6).

Les variations de taille sont également considérables. Parmi les plus petits poissons – qui sont aussi les plus petits Vertébrés – se placent beaucoup de Cyprinodontidés qui n’atteignent pas (du moins le mâle) 2 centimètres. Le record est sans doute détenu par deux Gobiidés des Philippines: Mystichthys , d’eau douce, mesure à peine plus de 1 centimètre et Pandaka , marin, est légèrement plus petit.

À l’opposé, parmi les géants, plusieurs espèces de Téléostéens (Thon, Silure glane, Tarpon, Flétan) dépassent 2 mètres de longueur. Arapaima , du Brésil, peut avoir 5 mètres (et peser 200 kg). Le Régalec, poisson marin assez rare, atteint cette taille mais, du fait de sa forme rubanée, son poids est beaucoup moins considérable. On connaît un fossile crétacé, l’Ostéoglossiforme Xiphactinus , qui atteignait lui aussi 5 mètres. Dans tous ces cas, on reste loin des Requins géants, pèlerin (9 m et 4 t) ou requin baleine (18 m et 8 t). La taille de la plupart des Téléostéens est modeste et se situe entre 15 et 30 centimètres.

2. Téguments et écailles

L’épiderme des Téléostéens est riche en glandes épidermiques unicellulaires. Les glandes cutanées pluricellulaires sont rares, et ce sont généralement des glandes à venin associées à divers dispositifs d’inoculation (épines operculaires des Rascasses, rayons épineux de la nageoire dorsale de la Vive...). Ce sont des glandes spécialisées qui constituent les photophores, organes producteurs de lumière [cf. PHOTOGENÈSE (biologie)] si répandus, en particulier chez les Téléostéens des zones marines profondes.

Le derme est formé essentiellement de nappes de fibres conjonctives et élastiques enroulées en spirale autour du corps. En général, plusieurs couches superposées ont des enroulements opposés et la direction des fibres est donc croisée d’une couche à l’autre, ce qui réalise un revêtement superficiel à la fois résistant et très souple.

Le derme contient aussi diverses catégories de cellules pigmentaires (chromatophores), dont la répartition réalise un plan spécifique de coloration susceptible de se modifier avec l’âge. En outre, chez certains poissons tout au moins, des déplacements de granules pigmentaires au sein des chromatophores permettent des modifications rapides de la coloration individuelle sous l’action de facteurs extérieurs comme l’éclairement, la teinte du fond, etc. Ces modifications de coloration qui constituent l’adaptation chromatique sont soumis à des mécanismes nerveux et endocriniens [cf. POISSONS].

Les écailles des Téléostéens (fig. 3) sont typiquement minces, incluses dans le derme, où elles prennent naissance; elles se recouvrent partiellement d’avant en arrière. Elles dérivent des écailles ganoïdes des Actinoptérygiens primitifs par amincissement et simplification de la structure [cf. ACTINOPTÉRYGIENS], en particulier perte de la dentine et de l’émail. Ces écailles «élasmoïdes» appartiennent à deux types: les écailles cycloïdes des Téléostéens généralisés sont à peu près circulaires, avec un bord postérieur lisse, et elles présentent une ornementation superficielle de fins épaississements grossièrement circulaires et concentriques, les circuli . Les écailles cténoïdes sont définies par leur bord postérieur garni de courtes épines disposées sur plusieurs rangs; elles caractérisent les Néotéléostéens comprenant les Paracanthoptérygiens (Baudroie, Morue) et les Acanthoptérygiens (dont les Percomorphes).

L’intérêt des écailles élasmoïdes réside dans leur structure. Elles comportent une très mince couche d’os à fibres entremêlées, qui édifie l’ornementation superficielle mentionnée ci-dessus. Elle recouvre la plaque basale beaucoup plus épaisse faite de couches superposées de fibres de collagène régulièrement disposées. Dans chaque strate, les fibres sont parallèles, mais l’orientation change d’une strate à la suivante; cette structure, qui évoque un contreplaqué, se présente sous deux variantes. La plus simple montre seulement deux orientations des fibres, à peu près perpendiculaires (contreplaqué orthogonal). L’autre disposition est plus compliquée: d’une strate à la suivante, l’orientation varie d’un angle à peu près constant, inférieur à 900, de sorte que l’on trouve généralement, suivant les espèces, cinq, six ou sept directions (contreplaqué en hélice). Le contreplaqué orthogonal se rencontre essentiellement chez les Téléostéens les plus évolués. Les Téléostéens les plus primitifs ont des écailles en contreplaqué hélicoïdal.

Mais certains groupes manifestent une réduction plus ou moins poussée de l’écaillure (écailles minuscules, enfouies dans le derme chez l’Anguille; peau «nue» de certains Silures). À l’inverse, on trouve aussi une hypertrophie du squelette cutané: les Épinoches ont les flancs garnis de quelques plaques osseuses épaisses; certains Poissons-chats (Loricariidés), les Syngnathes, les Coffres (Ostracion ) ont une carapace continue faite de plaques juxtaposées.

La croissance des écailles, étroitement synchrone à celle du poisson entier, dépend en premier lieu de l’alimentation. Le plus souvent, surtout chez les poissons d’eau douce des régions tempérées, les ressources alimentaires subissent des variations saisonnières qui ont des répercussions sur la croissance. Ces variations se traduisent sur l’écaille cycloïde ou cténoïde par des anneaux concentriques alternés et de structure différente. Des anneaux larges et clairs correspondent à la période estivale, tandis que la croissance plus limitée en hiver se traduit par des anneaux sombres plus étroits. Le cycle annuel de croissance est donc visible sur l’écaille dont l’observation permet de connaître l’âge du poisson sur lequel elle a été prélevée. Mais des événements exceptionnels ou périodiques qui ont des répercussions sur le métabolisme du poisson peuvent laisser des traces sur les écailles; c’est ainsi que maladies ou périodes de reproduction seront marquées par des irrégularités dans la disposition des anneaux. La lecture des écailles n’est donc pas toujours facile, et son interprétation exige de connaître avec précision dans chaque cas la biologie de l’espèce considérée.

3. Vessie gazeuse et flottabilité

La présence d’un diverticule œsophagien (ou pharyngoœsophagien) est un des traits les plus caractéristiques des poissons osseux (classe des Ostéichthyens). Il est très vraisemblable que, chez les formes primitives, ce diverticule ait eu un rôle respiratoire et qu’il fonctionnait comme un poumon grâce auquel le poisson pouvait respirer l’air atmosphérique à la surface de l’eau, lorsque le taux d’oxygène dissous était insuffisant pour assurer la respiration branchiale comme le font les Dipneustes actuels ou le Polyptère [cf. BRACHIOPTÉRYGIENS]. Les Crossoptérygiens de la période dévonienne, dont les premiers Vertébrés terrestres sont issus, étaient probablement amphibies.

Chez les Téléostéens, le diverticule œsophagien n’a que très rarement un rôle respiratoire (b); il est un organe hydrostatique, un flotteur qui facilite la nage et le maintien du poisson à un niveau déterminé. On l’appelle la «vessie natatoire» ou mieux «vessie gazeuse». C’est un sac allongé, rempli de gaz et qui occupe la partie dorsale de la cavité abdominale au-dessus du tube digestif. Il a pour origine une évagination de la paroi dorsale de l’œsophage, avec lequel une communication permanente est conservée par un «canal pneumatique» chez les Téléostéens les plus primitifs (disposition physostome ) [a]. Chez les Téléostéens évolués, au contraire, le canal pneumatique s’oblitère chez le jeune et la vessie gazeuse est alors isolée, sans communication avec l’extérieur; c’est la disposition physoclyste (fig. 4).

La vessie gazeuse a un développement plus ou moins considérable suivant les espèces et, en conséquence, le coefficient de flottabilité varie. Beaucoup de Téléostéens ont une flottabilité neutre, c’est-à-dire une densité égale à celle de leur milieu (1 pour l’eau douce, 1,026 pour l’eau de mer), ce qui est la condition idéale pour se maintenir sans effort à niveau constant dans leur milieu. Cette flottabilité neutre est obtenue par un certain volume de la vessie gazeuse: de 5 à 6 p. 100 du volume total pour un poisson marin, de 7 à 8 p. 100 pour un poisson d’eau douce. Elle est réalisée chez les poissons qui vivent en pleine eau où ils peuvent s’immobiliser sans difficulté, avec seulement quelques mouvements des nageoires pour conserver l’équilibre. C’est le cas, par exemple, des Cyprinidés (Carpes, Tanches), des Truites, du Brochet, de la Perche, en eau douce, et aussi de nombreux poissons marins, Gadidés, Mulet, Saint-Pierre (Zeus ).

D’autres poissons, littoraux ou benthiques, ont un comportement très différent; vivant sur le fond, ils se déplacent peu et nagent avec effort, retombant sur le fond dès que cessent les mouvements. Leur densité est sensiblement supérieure à celle du milieu, car ils n’ont qu’une vessie gazeuse très petite ou en manquent complètement. Sont dans ce cas des poissons comme les Gobies, les Blennies, les poissons plats (Sole, Plie).

Le contenu de la vessie gazeuse varie beaucoup suivant les espèces et suivant les conditions: chez les Physostomes des eaux superficielles, la vessie est remplie d’un mélange gazeux de composition voisine de celle de l’air, au moment de la venue en surface; chez les Physoclystes, la composition du contenu gazeux de la vessie est très différente de celle de l’air, au moins par les proportions des différents gaz: l’2 prédomine et le C2 abonde souvent.

Les Physoclystes et certains Physostomes présentent deux régions spécialisées de la paroi de la vessie, qui assurent le contrôle de la pression des gaz (fig. 4). Dans la région postéro-dorsale, une partie fortement vascularisée constitue un organe de résorption, l’ovale . Ce dernier peut être isolé de la chambre principale par un étranglement circulaire, sorte de sphincter. Comme la tension des gaz dans la vessie est plus élevée que dans le sang, la diffusion des gaz se fait vers le sang et il y a ainsi résorption du contenu vésical, résorption qui est un phénomène passif.

Au contraire, la sécrétion du gaz dans la cavité vésicale, qui accroît la pression dans celle-ci, est un phénomène actif exigeant un apport d’énergie. Son mécanisme est encore mal connu. Il met en jeu le corps rouge , ou glande à gaz, qui comprend un «réseau admirable» de fins capillaires étroitement disposés parallèlement.

4. Alimentation

Tous les régimes alimentaires se rencontrent sans doute parmi les Téléostéens. Les adaptations à ces régimes se manifestent par la conformation de l’appareil buccal, par la denture, par la structure des différents segments du tube digestif.

Les mangeurs de plancton ont adopté deux solutions. Ce peuvent être des poissons assez grands nageant avec la bouche largement ouverte, le courant d’eau ainsi créé dans la cavité buccale est filtré au niveau des branchies (Maquereaux...). D’autres poissons, à bouche petite, sont souvent pourvus d’un long museau qui leur permet de saisir une à une de petites proies; ce sont alors des microprédateurs plutôt que des planctonophages.

On considère comme prédateurs les poissons qui saisissent des proies volumineuses, plus ou moins mobiles. Certains sont peu exigeants, d’autres sont plus spécialisés: tels les ichtyophages (Brochet, Barracuda), les malacophages, les carcinophages. Le régime alimentaire d’une espèce évolue bien sûr avec l’âge et la taille des individus. Tous les embranchements ou presque du règne animal peuvent servir de proies à différentes espèces de Téléostéens.

Les mangeurs de coraux appartiennent à deux types. Les uns ont une bouche assez large avec une denture broyeuse robuste capable de concasser des morceaux de polypiers (Scaridés, Balistes). D’autres ont un long museau garni d’une petite bouche et saisissent les polypes un à un (Chætodontidés).

Les fouilleurs de vase peuvent utiliser les débris organiques ou les micro-organismes de la vase, mais le plus souvent ils y recherchent les petits animaux qui y vivent souvent en grand nombre (Mollusques, Vers, Insectes ou larves).

Les herbivores ont des régimes très variés, quelques Téléostéens mangent des Phanérogames d’eau douce ou marines (zostères des «herbiers», ou grandes algues marines). Beaucoup de végétariens se nourrissent d’algues microscopiques pélagiques ou benthiques (Chlorophycées, Diatomées), d’eaux douce ou marine.

Par rapport aux Actinoptérygiens plus généralisés, les Téléostéens se signalent par une grande mobilité du système des mâchoires et en particulier par la libération du maxillaire par rapport à la «joue», associée à un accroissement de la musculature adductrice de la mandibule. Les Téléostéens primitifs ont encore un maxillaire grand, denté, allongé au bord de la mâchoire supérieure (fig. 1).

Chez les formes supérieures, le prémaxillaire s’accroît vers l’arrière, recouvrant le maxillaire qui est exclu du bord de la mâchoire et ne porte donc plus de dents.

Mais beaucoup de Téléostéens très évolués (Cyprinidés, Perciformes) ont des mâchoires protractiles, c’est-à-dire capables d’être projetées en avant. Cette propriété est liée à quelques modifications anatomiques, dont les plus notables sont l’avancée de l’articulation mandibulaire, la libération du prémaxillaire par rapport au rostre, une simplification des muscles adducteurs. La protrusion des mâchoires constitue un mécanisme tout à fait efficace de capture des proies.

5. Modalités de la reproduction

Comme les autres Vertébrés, les Téléostéens sont typiquement unisexués. Pourtant, dans quelques groupes, existe un hermaphrodisme plus ou moins régulier. Par exemple chez les jeunes Anguilles, bien avant la maturité sexuelle, la gonade comporte dans des portions différentes de grosses ovogonies et des spermatogonies bien plus petites. Bientôt, une de ces catégories cellulaires régresse, tandis que l’autre poursuit son évolution. On a donc affaire à un hermaphrodisme transitoire, juvénile, qui n’est jamais fonctionnel. Dans quelques familles (Sparidés, Serranidés), l’hermaphrodisme est la règle, chez certaines espèces au moins. La gonade est un ovotestis comportant des portions mâles et des portions femelles distinctes. Chez certains Serranidés, la maturation simultanée des deux portions de la glande a été observée, et la possibilité d’autofécondation peut être envisagée.

Appareil génital

L’appareil génital des Téléostéens est simple comparativement à celui des autres Vertébrés. Les gonades paires (testicules ou ovaires, exceptionnellement ovotestis) sont logées au plafond de la cavité générale et y occupent un volume très variable suivant les espèces et surtout suivant la période du cycle sexuel, contrôlé par des facteurs internes (hypophyse en particulier), mais soumis également à l’action de facteurs externes (température, photopériode...). Les conduits génitaux (cf. appareil GÉNITAL) sont de simples prolongements des gonades, qui n’ont rien à voir avec les canaux de Müller (pour la femelle) ou de Wolff (pour le mâle) qui habituellement chez les Vertébrés donnent naissance aux oviductes et aux canaux déférents [cf. VERTÉBRÉS]. Les deux canaux symétriques, comme les uretères, se réunissent avant de s’ouvrir par un pore génital médian ventral distinct ou confondu avec le pore urinaire en arrière de l’anus (fig. 5). Chez certaines espèces, les œufs ou les spermatozoïdes, libérés dans la cavité abdominale, sont recueillis par de courts entonnoirs génitaux qui débouchent au pore génital. Les gonades des Téléostéens, comme celles des autres Vertébrés, associent à leur fonction d’élaboration des produits génitaux une activité hormonogène qui contrôle la vie sexuelle et détermine éventuellement les caractères sexuels secondaires.

Le dimorphisme sexuel

Le sexe des Sélaciens [cf. CHONDRICHTHYENS] est facilement identifiable grâce aux appendices copulateurs du mâle, associés aux nageoires pelviennes. Chez les Téléostéens, au contraire, les différences morphologiques entre mâle et femelle sont habituellement difficiles à percevoir, surtout en dehors de la période de reproduction. Pourtant, chez quelques espèces existent des caractères sexuels secondaires plus ou moins marqués.

Ces différences entre les sexes portent par exemple sur la taille, la femelle étant généralement plus grande que le mâle. Cette règle souffre des exceptions, ainsi celle que l’on observe chez le Dragonet (Callionymus ). Il s’agit d’ailleurs d’une différence statistique car, chez l’Anguille par exemple, les plus grands mâles (50 cm) surpassent les plus petites femelles (40 cm). La différence de taille la plus spectaculaire se rencontre dans un sous-ordre de poissons abyssaux, les Cératoïdes. Le jeune mâle se fixe par les mâchoires sur le tégument de la femelle, beaucoup plus grosse que lui. Les tissus des deux partenaires s’interpénètrent et le couple est alors indissociable. L’organisation du mâle est rudimentaire. Son appareil digestif, le foie excepté, régresse. En revanche, les testicules occupent la plus grande partie de la cavité abdominale. On cite le cas d’une femelle de Ceratias de 1,20 m de long et d’un poids de 7 kilogrammes, qui portait sur son flanc un mâle de 16 millimètres pesant 14 milligrammes.

Les différences morphologiques portent parfois sur les nageoires qui sont développées chez le mâle. Ainsi chez Callionymus , les premiers rayons de la dorsale du mâle sont hypertrophiés. Chez les Mollienisia (Pœcilidés), la dorsale du mâle est aussi très haute, tandis que dans le genre voisin, Xiphophorus , c’est la caudale qui porte chez le mâle quelques rayons très longs formant une sorte d’épée. Dans cette famille, d’ailleurs, où la viviparité est la règle, une modification bien visible de la nageoire anale du mâle en fait un appendice copulateur.

Les manifestations les plus répandues du dimorphisme sexuel concernent la coloration. Des différences dans le dessin ou dans les teintes sont parfois si importantes entre mâle et femelle que les deux sexes ont pu être décrits comme des espèces différentes. Souvent encore (Épinoche, Vairon), les individus des deux sexes ont, durant la plus grande partie de l’année, une coloration identique mais, pendant la période de reproduction, le mâle acquiert une «parure de noce» qui se traduit par des couleurs vives et brillantes [cf. POISSONS].

Les œufs et la ponte

Chez la grande majorité des Téléostéens, les œufs sont pondus dans le milieu, puis fécondés et abandonnés par les parents. Ce sont des œufs télolécithes (riches en réserve vitelline), donc de taille relativement grande mais très variable, entre 0,5 mm (Apogon ) et 4 ou 5 millimètres (Salmonidés). En moyenne, leur taille est de 2 ou 3 millimètres, mais un Poisson-chat (Galeichthys ) a des œufs d’une dimension exceptionnelle (20 mm). Le nombre des œufs à chaque ponte dépend évidemment de leur grosseur et de la taille des géniteurs. Pour faire des comparaisons, on rapporte le nombre d’œufs à l’unité de poids de l’animal, ce qui donne, en milliers d’œufs par kilo de géniteur:
DIR
\
Truite, Saumon 2
Brème, Brochet 50Hareng, Carpe 100Morue 500Turbot 1 100/DIR

Les œufs pondus sont pélagiques chez la plupart des espèces marines de haute mer. Au contraire, les Téléostéens marins littoraux et les espèces d’eau douce ont des œufs démersaux, c’est-à-dire déposés sur le fond, fixés ou non à un support.

La ponte des œufs et leur fécondation sont généralement précédées d’un comportement particulier des géniteurs, d’une «parade nuptiale», plus ou moins compliquée, propre à l’espèce. Si, le plus souvent, les pontes fécondées sont abandonnées, certaines espèces littorales, marines ou dulçaquicoles, édifient des nids plus ou moins élaborés et entourent leurs pontes et les jeunes de soins vigilants; quelques poissons littoraux recherchent pour pondre des cavités naturelles, telles que des coquilles vides de Mollusques (Gobiidés, Labridés...). Des poissons de rivière déposent leurs œufs dans un entonnoir peu profond préparé dans le gravier du fond (Centrarchidés, Salmonidés...). De véritables nids souvent compliqués sont édifiés avec des végétaux (Mormyridés, Épinoches...), nids flottants faits de mucus allégé de bulles d’air (Combattants, Gouramis...).

Un des cas les plus curieux de nidification est celui d’un petit Cyprinidé de l’Europe occidentale, la Bouvière (Rhodeus amarus , fig. 6). À la maturité des œufs, la papille génitale de la femelle s’allonge en un tube de ponte qui, après une parade nuptiale bien définie, sera introduit dans le siphon d’une moule d’eau douce (Unio ou Anodonta ). Les œufs sont ainsi déposés dans la cavité palléale du Mollusque où ils sont fécondés et se développent entre les lamelles branchiales. Ce qu’il y a de remarquable dans le comportement de la Bouvière, c’est que le Mollusque paraît indispensable à la fois au déclenchement de la ponte et au développement des œufs.

D’autres Téléostéens pratiquent une nidification originale à la surface ou dans des cavités de leur propre corps. Chez quelques Siluroïdes (Galeichthys ...), les Apogons, plusieurs Cichlidés (Tilapia ...), l’un des parents récolte les œufs fécondés dans sa cavité buccale, où ils subissent tout leur développement et où les jeunes trouvent encore refuge longtemps après l’éclosion: incubation buccale . Beaucoup de Syngnathidés pratiquent l’incubation cutanée . C’est le mâle qui recueille les œufs agglutinés dans la région abdominale de la peau. Chez d’autres Syngnathidés (Syngnathus , Hippocampus ...), c’est encore le mâle qui incube les œufs dans une poche cutanée (marsupium) de la région caudale (incubation marsupiale ). Il y a là une sorte de viviparité, mais il semble que les embryons qui disposent d’un abondant vitellus n’empruntent au parent que l’eau et l’oxygène.

Larves et métamorphoses

Le vitellus est utilisé plus ou moins complètement au cours du développement embryonnaire, de sorte qu’à l’éclosion il en reste une quantité très variable suivant les espèces: certaines ont encore un volumineux sac vitellin, tandis que d’autres, ayant consommé toutes les réserves, doivent s’alimenter dès ce moment.

L’alevin de Truite qui vient d’éclore se range dans la première catégorie; la Perche ou le Hareng appartiennent à la seconde (fig. 7). Il est fréquent que le développement et la croissance postlarvaires soient progressifs et que le jeune alevin, comme chez la Truite, ait à peu près les proportions de l’adulte.

Mais beaucoup d’espèces ont des larves d’aspect très particulier, caractéristique, et sont profondément différentes des adultes par leurs proportions et par un certain nombre de détails morphologiques. La forme définitive est acquise par des transformations plus ou moins rapides mais profondes, qui constituent une métamorphose.

Ainsi les Anguilles d’Europe ont une larve océanique de forme foliacée, le leptocéphale, qui naît vers les Bermudes et traverse l’Atlantique, entraîné par les courants. Lorsqu’il atteint les côtes européennes, il se transforme en une petite anguille non pigmentée, transparente, la civelle, qui envahit les eaux continentales et acquiert le pigment tégumentaire qui en fera une jeune anguille. Une larve comparable au leptocéphale se rencontre chez tous les représentants de l’ordre des Anguilliformes et chez ceux d’un groupe plus vaste, celui des Élopomorphes.

Les Clupes (Sardines, Harengs) ont aussi une larve rappelant un leptocéphale, mais avec des proportions particulières. Tandis que, chez l’adulte, la nageoire dorsale occupe à peu près le milieu du corps, elle est très reculée chez la jeune larve et elle se déplace vers l’avant au cours de la croissance larvaire.

Les Pleuronectes, poissons plats dissymétriques à l’état adulte, dont les deux yeux sont situés sur un même côté de la tête et dont la face «aveugle» est dépigmentée, naissent sous la forme d’une larve banale ayant l’aspect d’un petit poisson symétrique. La transformation est ici assez brutale et consiste, en particulier, en une déformation du crâne, avec migration d’un œil (le droit ou le gauche suivant les cas) du côté opposé de la tête. Au cours de cette métamorphose, l’animal pélagique devient benthique; la face oculée se pigmente abondamment, tandis que la face aveugle, qui repose sur le fond, n’acquiert que des pigments clairs.

Bien d’autres espèces de Téléostéens présentent un stade larvaire original et caractéristique (fig. 7 [leptocéphale des Anguilles, par ex.]).

Oviparité et viviparité

Chez les Poissons comme chez les autres animaux, les relations entre les œufs fécondés et le géniteur maternel se présentent selon deux situations fondamentales. Dans l’oviparité, les œufs pondus sont fécondés et se développent hors de l’organisme maternel. Dans la viviparité, les œufs sont conservés dans l’organisme maternel; ils y sont fécondés (fécondation interne) et leur développement s’y déroule plus ou moins longtemps. Cependant, il faut distinguer la viviparité vraie et l’ovoviviparité . Dans la première, les œufs, plus ou moins pauvres en substances de réserve, se nourrissent aux dépens de la mère. Cela implique des dispositifs anatomiques qui permettent des échanges trophiques faciles entre l’organisme maternel et l’embryon. C’est chez les Mammifères que la viviparité atteint son plus haut perfectionnement (cf. EMBRYOLOGIE - Vie fœtale). Dans l’ovoviviparité, les œufs se développent, après fécondation interne, dans l’organisme maternel, mais sans emprunter à celui-ci d’autres aliments que l’eau et l’oxygène. La distinction entre viviparité vraie et ovoviviparité est souvent difficile à faire dans l’état actuel des connaissances. Quoi qu’il en soit, si la plupart des Téléostéens sont ovipares, un certain nombre d’espèces sont vivipares, mais au sens large, car sans doute dans beaucoup de cas cette viviparité n’est-elle qu’une ovoviviparité.

La viviparité se rencontre donc parmi les Téléostéens; sporadiquement, dans quelques espèces appartenant à plusieurs familles d’Acanthoptérygiens marins (Scorpénidés, Embiotocidés, Zoarcidés...); régulièrement, dans plusieurs familles de Cyprinodontiformes d’eau douce (Anablepsidés, Goodeidés et surtout Pœcilidés).

Chez les Pœcilidés (Xiphophore), la fécondation intervient avant l’ovulation, de sorte que le début au moins du développement se déroule dans le follicule, mais celui-ci s’achève dans la cavité ovarienne où l’embryon baigne dans un liquide riche en protéines, en glycogène, et contenant des gouttelettes d’huile. La gestation dure de deux à trois semaines environ et les portées se succèdent rapidement lorsque les conditions sont favorables. Généralement, il s’écoule quelques jours entre une parturition et le début du développement d’un nouveau lot d’œufs. Mais, dans certaines espèces, une portée commence son développement avant la mise bas de la portée précédente. Plusieurs portées d’âges différents sont donc en gestation simultanément. Ce phénomène exceptionnel porte le nom de superfétation .

Vie sexuelle

Les comportements associés à la vie sexuelle sont très diversifiés chez les Téléostéens et comportent les parades nuptiales, l’édification d’un nid, les soins à la ponte et aux jeunes [cf. COMPORTEMENT ANIMAL]. Certaines espèces sont soumises à des déplacements de populations plus ou moins amples, que l’on désigne sous le nom de migrations. En fait, les migrations des poissons comportent deux sortes de déplacements. Un rassemblement des géniteurs sur des territoires limités (aires de ponte), où les œufs déposés et fécondés trouvent des conditions favorables à leur développement: c’est la migration génétique. Puis la population se disperse sur des territoires où les jeunes vont trouver l’alimentation abondante nécessaire à leur croissance: c’est la migration trophique. En dehors des espèces connues pour l’ampleur de leurs migrations: Hareng, Morue, Thon, Anguille, Saumon... [cf. MIGRATIONS ANIMALES], de nombreuses espèces d’eau douce ou marines littorales sont soumises à des mouvements collectifs périodiques peu étendus, mais qui présentent les caractères des deux types de migration.

6. Classification

Les Téléostéens sont des Actinoptérygiens caractérisés par la possession de grands hypuraux (épines hémales allongées) au niveau de la queue. Cette disposition a pour effet de rendre celle-ci extérieurement symétrique bien que son squelette conserve toujours l’asymétrie primitive rencontrée chez les Ostéostracés et les Gnasthostomes généralisés. Le prémaxillaire mobile et divers autres caractères anatomiques (musculature de la mâchoire, disposition du foramen de la carotide interne) sont des apomorphies différenciant les Téléostéens des Halécostomes [cf. ACTINOPTÉRYGIENS].

Seules quelques formes fossiles sont suffisamment bien connues pour qu’il soit possible de leur assigner une place dans le cladogramme des Téléostéens: ce sont, par ordre de dérivations successives, du plus généralisé au plus évolué, les Pachycormidés, les Aspidorhynchiformes Pholidophorus bechi , Leptolepis coryphaenoïdes et les Ichthyodectiformes.

Fondée sur l’anatomie des formes actuelles, l’étude de la phylogénie des Téléostéens (fig. 8) a permis d’en distinguer quatre grands ensembles monophylétiques: les Ostéoglossomorphes, les Élopomorphes, les Clupéomorphes et les Eutéléostéens. Ces clades partagent plusieurs synapomorphies, particulièrement au niveau du squelette des arcs hyoïdien et branchiaux.

Ostéoglossomorphes

Les Ostéoglossomorphes sont les Téléostéens actuels qui possèdent le moins de synapomorphies du groupe. Ils sont principalement caractérisés par la présence de fortes dents sur certains os du palais et sur l’os de la
langue, un petit prémaxillaire fixé au crâne, une disposition spéciale de l’intestin dans la cavité générale, etc. Chez certains d’entre eux (Ostéoglossoidei) comme Osteoglossum ou Arapaima , l’incubation buccale est de règle. Un autre groupe, les Notopteroidei, comprend les Mormyres d’Afrique tropicale, qui se nourrissent la nuit de petits vers qu’ils repèrent par électrolocation; leurs organes électriques proviennent de la modification des muscles de la queue. Les deux espèces du genre Hiodon sont les seuls Ostéoglossomorphes d’Amérique du Nord.

Élopomorphes

Les Élopomorphes comprennent aussi bien des poissons morphologiquement «classiques» comme les Élopidés ou le Tarpon, que des formes plus «étranges» comme le Saccopharynx bathypélagique.

La monophylie de ce groupe est établie non seulement sur des caractères ostéologiques (présence d’osselets dans le museau, fusion d’os dans la mâchoire), mais aussi par une ontogenèse passant par le stade larvaire leptocéphale. La majeure partie des Élopomorphes est classée parmi les Anguilloidei qui renferment d’une part les Anguillidés, dont le cycle biologique se partage entre la mer et les eaux douces, et d’autres familles apparentées exclusivement marines, et d’autre part les Saccopharyngoidea (trois familles), poissons des grandes profondeurs possédant une bouche proportionnellement énorme.

Le groupe frère des Anguillodei regroupe les Albuloidea et les Halosauroidea . Parmi les formes les moins dérivées, les Mégalopidés (Tarpons) peuvent atteindre une grande taille; un diverticule de leur vessie gazeuse entre en connexion avec l’oreille.

Clupéomorphes

Les Clupéomorphes sont des poissons principalement marins regroupés sur la base de caractères évolués relatifs à la connexion de leur vessie gazeuse avec l’oreille suivant des modalités particulières, à l’architecture du neurocrâne ou à celle du squelette de la queue.

Clupéomorphes et Eutéléostéens se rapprochent par la fusion des plaques dentaires aux éléments endosquelettiques du squelette pharyngo-branchial et par celle de certains os de la mandibule

Les Clupéomorphes se divisent en cinq familles parmi lesquelles les Engraulidés (Anchois) et les Clupéidés (Harengs, Sardines) dont la pêche alimente une importante industrie de conservation. Les quatre familles quantitativement les plus importantes (dont les deux déjà citées) présentent plusieurs adaptations anatomiques en relation avec un régime microphage.

Eutéléostéens

Ce très vaste ensemble n’est caractérisé que par trois particularités qui peuvent parfois disparaître chez certains groupes: la présence d’une seconde nageoire adipeuse, celle de tubercules nuptiaux sur la tête et le corps, et celle d’une composante membraneuse sur la première épine uroneurale. Les Eutéléostéens les moins dérivés sont les Escoae , avec les Ésocidés (Brochet) et les Umbridés.

Les Téléostéens plus évolués sont caractérisés par la perte de dents sur un os du plancher pharyngien. Les Ostariophysaires réunissent quelque six mille espèces réparties en quatre grands groupes. Ils possèdent des cellules qui, lorsqu’elles sont endommagées (par un prédateur, par exemple), libèrent dans l’eau des phéromones d’alarme.

Les trois groupes les plus dérivés, les Characiformes, les Cypriniformes et les Siluriformes, sont des Ostariophysaires caractérisés par la présence d’une chaîne de petits os (cf. les osselets de Weber, fig. 9) qui relient le bord antérieur de leur vessie gazeuse à l’oreille interne, améliorant ainsi la capacité auditive de ces poissons.

Les Characiformes (plus de 1 000 espèces) sont principalement des poissons des eaux douces néo-tropicales ou africaines.

Les Cypriniformes (plus de 400 espèces, dont la Carpe et le «poisson rouge» des aquariophiles), également dulçaquicoles, sont surtout des herbivores (quelques piscivores): ils possèdent une bouche protractile, acquise indépendamment de celle des Acanthoptérygiens.

Les Siluriformes comptent environ deux mille espèces de Poissons-chats répartis en trente et une familles; une espèce de Siluridé peut atteindre plus de 3 mètres de longueur. Proches parents des Silurifomes, les Gymnotes ont développé de puissants organes électriques à partir de la musculature hypo-axiale troncocaudale.

Les Salmonidés (Saumons, Truites), cantonnés à l’hémisphère Nord avant l’intervention de l’homme, partagent avec les Eutéléostéens plus dérivés (Néotéléostéens) quelques caractères au niveau du squelette rostral et occipital.

Les Néotéléostéens se divisent eux-mêmes en plusieurs groupes monophylétiques qui, par nombre croissant de caractères évolués partagés, sont les Stomiiformes (dont beaucoup sont des poissons des profondeurs moyennes et portent des organes lumineux), les Aulopiformes, les Myctophiformes, les Paracanthoptérygiens, qui regroupent des poissons comme les Gadiformes (Morue) ou les Lophiiformes (Baudroie), et enfin les Acanthoptérygiens. Paracanthoptérygiens et Acanthoptérygiens partagent quelques caractères évolués, comme la présence d’écailles cténoïdes ou une tendance à l’élévation des pectorales et à une avancée des pelviennes en position thoracique, etc.

Les Acanthoptérygiens possèdent des traits particuliers au niveau de la musculature et du squelette bucco-pharyngobranchiaux. Ils se divisent en deux clades, les Athérinomorphes et les Percomorphes. Aux premiers appartiennent les Athérinidés, les Cyprinodontiformes, les Bélinoformes (dont fait partie l’Exocet), etc. Les seconds renferment de nombreux groupes, comme les Lampridiformes (Lampris), les Dactyloptériformes (Grondin volant), les Gastérostéiformes (Épinoche, Hippocampe) et Pégasiformes, les Béryciformes (Dorade) et Zéiformes (Saint-Pierre), et enfin les Perciformes qui, avec les Scorpéniformes (Rascasse), les Tétraodontiformes (Baliste, Poisson-lune), les Pleuronectiformes (Poissons plats) et quelques autres groupes, sont réunis sur la base de quelques caractères du squelette caudal.

7. Holostéens

Les naturalistes désignaient sous le terme d’Holostéens un ensemble artificiel (grade évolutif) de poissons dans lequel il est possible de reconnaître deux groupes naturels (monophylétiques) actuels: les Ginglymodes, avec Lepisosteus , et les Halécomorphes, avec Amia .

Lepisosteus et Amia , qui vivent tous deux dans les eaux continentales de l’Amérique du Nord; cependant, une espèce de Lepisosteus (fig. 10) du bassin du Mississippi se rencontre aussi en mer dans le golfe du Mexique.

Le genre Lepisosteus a conservé quelques caractères primitifs (écailles épaisses d’os compact recouvertes de ganoïne, valvule intestinale), mais ceux-ci sont associés à de nombreux traits de spécialisation. Le corps est allongé (une espèce atteint 3 m de long) avec nageoires dorsale et anale superposées (comme cela se rencontre chez quelques Téléostéens, tel le Brochet); le museau est long et étroit, ce qui entraîne des remaniements importants dans l’architecture du crâne.

Les Lepisosteus sont des poissons peu actifs, susceptibles cependant d’une nage rapide sur faible distance, pour capturer les poissons dont ils se nourrissent.

La ponte a lieu au printemps; les œufs fécondés (5 mm de diamètre) sont collés sur les cailloux du fond près des rives.

Le genre Amia est beaucoup moins spécialisé que Lepisosteus . Le corps est plus épais, la tête, courte, est massive, la nageoire dorsale est longue. La caudale, comme celle de Lepisosteus d’ailleurs, est faite d’un seul lobe arrondi, à peu près symétrique, mais son endosquelette a conservé une dissymétrie marquée. Les écailles, sans ganoïne, sont minces et peu différentes de celles des Téléostéens.

Comme Lepisosteus , Amia utilise, le cas échéant, pour les échanges respiratoires, la vessie gazeuse dont la paroi présente des replis vascularisés. En captivité dans un grand aquarium, Amia vient parfois piper en surface de l’air qui passe dans la vessie gazeuse. Le rythme de ces «prises» est accru si la teneur en oxygène dissous diminue. Grâce à ce comportement, Amia peut survivre dans une eau très pauvre en oxygène. Mais si l’on empêche, par un grillage immergé, l’animal de s’approcher de la surface, la mort par asphyxie survient bientôt.

Amia calva , unique espèce actuelle du genre, peut atteindre 70 centimètres; elle est répandue en Amérique du Nord, au sud du Canada, dans les lacs et les rivières calmes.

Amia se nourrit de Poissons, d’Amphibiens et d’Invertébrés variés. La ponte a lieu parmi les plantes aquatiques, dans un nid circulaire préparé sur le fond par le mâle. Les œufs mesurent 2 ou 3 millimètres de diamètre et chaque femelle en fournit plusieurs dizaines de milliers, répartis souvent dans les nids de plusieurs mâles qui en assurent la garde.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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